Vers 13:00 on lève l'ancre, vent arrière de 20 nœuds,
peu de houle, une belle nav en perspective. On fait une heure de
moteur pour les fameuses batteries puis l'on hisse la grand voile.
Puis plutôt que de sortir le génois on se prépare
à mettre le Spi. On attache les bras, et on hisse la chaussette...
quelques secondes plus tard on a un spi de 160 m² qui nous
tracte à la vitesse de 9 nœuds. Notre spi est marqué
de "ad augusta per angusta" (à des résultats
grandioses par des voies étroites. Mot de passe des conjurés
au 4ème acte d'Hernani, de Victor Hugo. On n'arrive au triomphe
qu'en surmontant maintes difficultés:petit Larousse, pages
roses). Une petite heure de nav sous spi et les ennuis commencent,
surtout par manque de vigilance ce qui est toujours fatal sous spi.
Personne n'est aux bras de spi pour les régler et surtout
pour maintenir les points de bras à la même hauteur,
le barreur venait de dire "c'est terrible ! il tient facilement
20° à la barre". Bref déjà deux erreurs
qui font que le spi va s'enrouler autours du génois (qui
lui-même est enroulé).
Là commencent 2 heures de grosses galères et ce qui
suit est une bonne illustration de ce qu'il ne faut pas faire....
Le spi est donc bien enroulé autours du génois et
comme on arrive pas à le désenrouler, on commence
par détacher les bras de spi pour pouvoir le faire tourner
plus facilement autour du génois. Mais ça marche pas,
l'enrouleur de génois semble lui aussi avoir envie de tourner
avec le spi mais est stoppé par les écoutes, on ne
fait ni une ni deux, on enlève les écoutes du génois
pour le rendre plus libre (on est déjà à 4
grosses erreurs). Le spi est toujours enroulé sur le génois
et notre dernière manœuvre n'à rien changé.
Finalement on arrive à le désenrouler, mais uniquement
sur le bas du génois, 95 % du spi est libre et flotte au
vent, mais il y a toujours 3 tours de spi autour du génois
en tête de mât, ce qui fait que l'on peut absolument
pas baisser la chaussette ni même affaler le spi. Dans nos
bêtises on a quand même gardé à poste
un bras de spi pour pouvoir le consoler un peu, je sais pas si vous
avez déjà essayé de contrôler un spi
qui faseille au vent avec un bras de spi, mais plusieurs équipiers
y laissent un peu de peau de leur main et particulièrement
Guls qui sera gravement blessée. On est dans le caca, on
se dit qu'en mettant les moteurs on pourra tourner sur nous même
et que si l'on tourne dans le bon sens on pourrait désenrouler
les 3 tours en haut du génois. C'est parti mon kiki, tout
le monde sur la plage avant pour aider (ou plutôt forcer)
le spi à passer, c'est là que l'on blesse les deux
membres d'équipage et en plus on flingue un des moteurs (embrayage)
et on arrête juste à temps pour pas flinguer l'autre
(y commençait à siffler grave). Il ne nous reste pas
beaucoup de solutions, la nuit tombe dans une heure, il y a toujours
20 nœuds de vent... On remet le cap vers la Blanquilla, on se dit
que là-bas on pourra affaler tranquillement quitte à
envoyer quelqu'un en haut de mât, ce que nous voulions faire
immédiatement, mais le skipper met fin à nos bêtises
en annulant cette manœuvre (Dieu merci). On arrivera à la
blanquilla de nuit.. Mais on n'a pas mieux pour l'instant avec un
spi au vent que l'on peut même pas larguer. On hisse donc
la grand voile, ce qui a pour effet de couper le vent au spi qui
se tient maintenant tranquillement et pendouillant parallèlement
au mat. Aussitôt 3 équipiers se mettent à le
tourner sur lui-même, comme pour essorer une serviette qui
sort de l'eau, pour l'empêcher de pourvoir se gonfler à
nouveau.
La situation est déjà plus confortable, on a plus
de spi qui flotte au vent, mais il est sagement plaqué au
mat (ce qui en fait est à peine mieux). On va pour le faire
tourner autour du génois, mais il doit être méchamment
pris en haut car il ne veut rien savoir. Mais on peut sortir un
peu de génois pour aller plus vite et pour mieux remonter
au vent vers la Blanquilla. La sortie du génois a en plus
décoincé le spi en haut de mat, on peut maintenant
lui faire faire les 3 tours autours du génois pour le débloquer
totalement... en quelques minutes c'est fait, puis la chaussette
descend et enfin on affale le spi, quel soulagement ! Deux heures
de grosses galères.
Il est 18:00 et on remet le cap vers Los Testigos, grand voile et
génois. Pour réconforter l'équipage Ramzi et
Marie nous font des grosses pizzas délicieuses et l'on commence
donc les quarts de nuits soulagés et repus. 8:00 à
10:00 skipper et sa femme, 10:00 à 12:00 Ramzi et Marie,
12:00 à 02:00 Olivier et Cathy, 02:00 à 04:00 Thomas
et Agnès et de nouveau skipper et sa femme à partir
de 4:00. Pendant le car de 02:00 on passe l'île de Orchilla
qui est une île militaire et dont on ne peut approcher à
moins de 5 miles.